Tuesday 8 October 2013

Sonya Yoncheva triumfant as Lucia

"Hier, dans la douceur de pré-mousson de ce dimanche après-midi, on retournait voir cette régie pour Sonya Yoncheva, dont tout Paris bruissait. Cette brune alerte au regard de velours, 31 ans et l’air d’en avoir 20, a conquis Paris lorsque Marc Minkowski lui a demandé de se substituer à Nathalie Dessay pour les trois rôles féminins des Contes d’Hoffmann. Jusque là cette artiste, issue du Jardins des Voix des Arts florissants, avait parcouru essentiellement le répertoire baroque, avec dès 2011 une splendide Cléopâtre, puis à Lille pour Emmanuelle Haïm une Poppée qui en avait fait délirer plus d’un. Oui mais Lucia ? Sa tessiture impossible, son art du belcanto poussé jusqu’à l’absolu, son personnage blessé, cette Folie qu’on approche toujours avec terreur même en étant simplement spectateur ? Eh bien, pour nous, Lucia c’est elle désormais.

On n’avait pas entendu une telle science du belcanto depuis au moins Mariella Devia, mais avec en plus un timbre profond, des aigus moirés et alertes, et dans la voix toute l’émotion des mots. Car même dans les vocalises les plus périlleuses, le mot règne, l’émotion se dispense et vous saisit. Cela nous rappelle une certaine Virginia Zeani. Secret absolu de cet art, sa faculté à porter le plus infime pianissimo jusqu’au dernier rang du dernier balcon de Bastille. Cette voix est si bien placée, son émission si naturelle, son corps harmonique si sain qu’elle pourra se confronter à tout le belcanto, de Haendel à Verdi. La pureté du style elle-même émouvait. Et l’actrice se tire très bien d’une mise en scène inutilement dangereuse. Tout Bastille debout en ovation soutenue après la Folie, et nous avec. On avait le sentiment d’assister à la naissance d’un monstre sacré. Si vous ne l’avez pas déjà entendue, courrez vous brûler à cette Lucia."


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